Les émissions de CO2
Des amendes qui font grimper les prix
10 décembre 2019 agvs-upsa.ch – Les importateurs automobiles suisses ont dû payer un montant record de 31,1 millions de francs d’amendes liées au CO2 en 2018. Selon les premières estimations, ce montant pourrait atteindre 50 à 80 millions de francs pour l’année en cours. Et en 2020, le passage au cycle WLTP et le renforcement des prescriptions sur les émissions de CO2 devraient faire grimper ce total à 300 millions de francs. UPSA media a demandé à Amag et au groupe Emil Frey quelles étaient les conséquences pour les importateurs, mais aussi pour les garagistes.
jas. Chaque importateur doit respecter une valeur cible spécifique assignée à son parc de nouveaux véhicules pour les émissions de CO2. En Suisse, des sanctions sont imposées depuis déjà 2012 aux importateurs de nouveaux véhicules avec des émissions de CO2 trop élevées. Les 74 grands importateurs répertoriés par l’Office fédéral de l’énergie (OFEN) ainsi que les petits importateurs ayant des décomptes individuels ont dû débourser la somme colossale de 31,1 millions de francs pour les voitures de tourisme importées en 2018. Les plus durement touchés ont été FCA Switzerland SA, importateur des marques Abarth, Alfa Romeo, Fiat, Jeep et Lancia, ainsi que Mercedes-Benz Suisse SA, importateur de Mercedes-Benz, Smart et Maybach, et encore Mazda Suisse. Ces trois grands importateurs ont dû régler près de 85 % du total des amendes.
La loi actuelle sur le CO2 prévoit l’adaptation des valeurs cibles de CO2 pour les voitures de tourisme et l’introduction de nouvelles valeurs cibles pour les voitures de livraison et les tracteurs à sellette légers dès 2020. La valeur cible de 95 g de CO2/km sera reprise des réglementations de l’UE pour les voitures de tourisme dès 2020. Une valeur cible de 147 g de CO2/km sera appliquée aux voitures de livraison et aux tracteurs à sellette légers dès 2020. Ces valeurs cibles sont très difficiles à atteindre pour les importateurs, car les valeurs de CO2 selon le nouveau procédé de mesure WLTP seront aussi introduites dès 2020. Ces dernières seront ainsi plus hautes, car les mesures WLTP représentent des consommations plus élevées et plus proches de la réalité.
Exemple tiré d’une liste de l’émission «Kassensturz»: la valeur de CO2 du modèle très apprécié en Suisse qu’est la Skoda Octavia Combi, avec 2.0 TDI et 4x4, passera de 131 g de CO2/km jusqu’à présent selon le NCEC à 164 g avec les mesures WLTP. Ces 33 g de plus font un tort considérable aux importateurs. Pour l’année 2019, la sanction se monte à 111 francs par gramme de CO2/km dépassant la valeur cible de chaque véhicule. Et elle sera de 109 francs en 2020. Cela signifie que les 33 g supplémentaires dus à la nouvelle méthode de mesure pourraient à eux seuls coûter aux importateurs 3597 francs de sanction par modèle Skoda en 2020. Le montant des sanctions est redéfini chaque année depuis 2018. Le Conseil fédéral ne règle pas seulement la méthode qui permet de le fixer, mais s’oriente également en fonction des montants pratiqués dans l’UE et du taux de change actuel.
Un point positif toutefois pour la branche automobile: l’introduction des nouvelles valeurs cibles en 2020 est accompagnée d’une phase transitoire avec des allègements jusqu’en 2022. Pendant cette période dite de «phasing-in», seuls 85 % des véhicules, et plus précisément ceux présentant les émissions de CO2 les plus basses, seront pris en compte pour le calcul des valeurs cibles en 2020. Cette proportion passera à 90 % en 2021, puis à 95 % en 2022. Mais ce «phasing-in» est combattu sur le plan politique : dans sa version de la loi sur le CO2, le Conseil des États l’a en effet supprimé dès 2021 pour les voitures de tourisme. Si le Conseil national le suivait, les conséquences seraient encore plus lourdes en ce qui concerne le montant des sanctions des importateurs.
Par ailleurs Mais à l’instar de ce qui se passe au niveau européen, l’application des prescriptions sur les émissions de CO2 sera également soumise à une phase de transition pour le calcul des valeurs cibles et pour les valeurs cibles individuelles. Jusqu’en 2020 (compris), les valeurs « NCEC 2.0 » mesurées effectivement ou calculées sur la base de la valeur WLTP seront ainsi appliquées pour le calcul des émissions des véhicules. Andreas Burgener, directeur d’auto-suisse, déclare à ce sujet : « Malgré ce calcul rétroactif, de nombreux modèles appréciés en Suisse afficheront des valeurs de CO2 plus élevées sur le papier. Le même véhicule avec une motorisation et un équipement identiques peut ainsi, depuis 2018, être intégré au calcul avec un gramme de CO2 en plus qu’avant le passage au nouveau cycle d’essai. » (Cf. également vidéo explicative)
Les importateurs pourront également décompter durant les trois années précédant 2022 des « supercrédits » pour les véhicules particulièrement respectueux de l’environnement avec des émissions de CO2 très basses. Durant les années de référence 2020 à 2022, les véhicules avec moins de 50 g de CO2/km seront ainsi comptés 2 fois, puis 1,67 fois et enfin 1,33 fois en 2022.
Cela explique aussi les efforts des importateurs pour mettre sur le marché davantage de véhicules totalement ou au moins partiellement électriques. « La branche est consciente que le passage à l’électrique est incontournable », explique Andreas Burgener, directeur d’auto-suisse. « Mais il ne faut pas oublier que l’électricité et l’hydrogène doivent être produits sans empreinte carbone. Si c’est le cas, il faut aussi en tenir compte dans le bilan carbone. » L’association des importateurs constate de plus que la Suisse doit bien plus réduire ses émissions de CO2 que l’UE durant le même laps de temps. Enfin, rien qu’en raison de la proportion plus élevée de 4x4 parmi les nouveaux véhicules, la Suisse part déjà avec des émissions de CO2 plus élevées. Selon auto-suisse, avec des efforts identiques à ceux de l’UE, la Suisse n’atteindra donc la valeur moyenne de 95 g/km qu’en 2025. Jusque-là, les importateurs devront s’attendre chaque année à des amendes salées pour le dépassement des valeurs cibles.
Et pour couronner le tout, les ventes de diesel ont massivement reculé en Suisse en 2019 et la stratégie « 10/20 » très ambitieuse d’auto-suisse aura donc une incidence plus faible. Cette stratégie prévoit qu’une voiture neuve sur dix soit électrique (VEB) ou hybride rechargeable (Plug-in-Hybrid, PHEV) en 2020 en Suisse. Seules cette électrification nette du trafic individuel motorisé et la croissance des propulsions alternatives, comme le GNC ou les moteurs hybrides, aideront les importateurs à atteindre les valeurs cibles souhaitées.
Il est primordial que les clients optent encore plus, dès 2020, pour des véhicules avec des émissions de CO2 plus basses. Sans cela, des amendes plus conséquentes s’abattront sur les importateurs l’année suivante et finiront tôt ou tard par se répercuter sur les prix pratiqués. Il est en effet impossible pour les fabricants et les importateurs de payer eux-mêmes des millions sur le long terme. Ils devront les répartir en réduisant les marges des commerces et à travers des augmentations de prix pour les clients. Et le fait que les montants ainsi récoltés terminent leur course dans le Fonds pour les routes nationales et le trafic d’agglomération (FORTA) n’est qu’une bien maigre consolation.
Afin de connaître plus précisément les amendes auxquelles la branche doit s’attendre en 2020, UPSA media s’est entretenu avec Morten Hannesbo, CEO d’Amag Group SA, et Marcel Guerry, directeur du groupe Emil Frey Suisse.
Monsieur Hannesbo, avec l’objectif « 10/20 », auto-suisse a souhaité mettre plus de voitures électriques sur les routes. Comment cette stratégie fonctionne-t-elle pour le groupe Amag ?
Morten Hannesbo, CEO d’Amag Group SA: Nos fabricants ont annoncé des véhicules électriques très intéressants pour 2020, à l’image du modèle ID.3, proposé à un prix attrayant. Nous attendons aussi de nouveaux modèles hybrides rechargeables. Je suis donc optimiste et je pense que nous atteindrons l’objectif d’ici la fin 2020.
Les amendes liées au CO2 se sont élevées à plus de 31,1 millions de francs en 2018. En 2019, la valeur cible de 130 g de CO2/km n’a pas changé. Partez-vous du principe que les sanctions de près de 820 000 francs resteront, elles aussi, au même niveau pour le groupe Amag ?
Notre objectif est de ne pas avoir à payer de taxes d’incitation avec nos marques. Nous avons cependant un groupement d’émissions avec toutes les marques de Volkswagen AG. En 2018, nous avons dû payer tout juste un million de francs de taxes d’incitation. Ce montant sera plus élevé en 2019.
À partir de 2020, la valeur cible moyenne sera abaissée de 130 à 95 g de CO2/km : comment planifiez-vous votre flotte pour éviter des amendes salées ?
L’année 2020 constituera effectivement aussi un grand défi pour nous. Nous nous attendons bien évidemment à ce que les nouveaux VEB et PHEV aient une influence conséquente. Mais nous aurons aussi une mission importante, celle de rendre alléchantes pour le client ces technologies et les autres motorisations efficientes. Nous devrons agir ici sur tous les plans.
N’êtes-vous pas incité à immatriculer encore des véhicules à fortes émissions de CO2 à la fin 2019, afin de compenser les objectifs renforcés avec un montant de 109 francs dès le premier gramme à partir de 2020 et d’éviter ainsi des amendes plus élevées ?
De telles actions ont toujours leurs avantages et leurs inconvénients. Chaque voiture immatriculée au préalable enregistre aussi une perte de valeur si elle ne peut être vendue que plus tard. Nous réfléchirons donc dans le détail à ce type d’activités et ne les prendrons sans doute pas en considération.
Les clients se laissent séduire petit à petit par les voitures électriques et au GNC, mais les SUV et les 4x4 sont toujours très appréciés des Suisses. Comment pensez-vous guider le client pour éviter des amendes ?
Les SUV et les 4x4 deviennent eux aussi de plus en plus efficients. Nos partenaires de marques auront sûrement pour tâche de définir précisément les besoins des clients et de leur présenter des alternatives en conséquence. Sans compter qu’une grande partie des nouvelles voitures électriques de Volkswagen disposent aussi d’une traction intégrale et qu’il ne s’agit donc pas obligatoirement d’un conflit d’objectifs.
Qui passera à la caisse pour payer les amendes ? En tant qu’importateur et garagiste, vous pouvez bien sûr adapter, par exemple, les marges des garagistes, mais vous reportez ainsi les sanctions sur les régions et sur vos propres succursales Amag…
Ni Amag en tant qu’importateur, ni les garagistes ne fabriquent les véhicules proposés à la vente. Selon un accord passé entre Amag et Volkswagen AG, qui a intérêt à ce que toutes les marques se retrouvent dans un groupement d’émissions, le fabricant assume les sanctions en cas de besoin. Mais c’est aussi dans l’intérêt du fabricant que les dépenses restent aussi faibles que possible. Des augmentations de prix seront donc vraisemblablement inévitables pour certains modèles.
Monsieur Guerry, avec l’objectif « 10/20 », auto-suisse a souhaité mettre plus de voitures électriques sur les routes. Comment cette stratégie fonctionne-t-elle pour le groupe Emil Frey ?
Marcel Guerry, directeur du groupe Emil Frey Suisse: Aujourd’hui, le groupe Emil Frey vend près de 40 % de tous les véhicules à faibles émissions (hybrides / hybrides rechargeables / VEB) en Suisse, selon les chiffres d’auto-suisse.
Les amendes liées au CO2 se sont élevées à plus de 31,1 millions de francs en 2018. En 2019, la valeur cible de 130 g de CO2/km n’a pas changé. Partez-vous du principe que les sanctions resteront, elles aussi, au même niveau pour le groupe Emil Frey ?
L’assortiment mixte de notre groupe nous permet de partir du principe que nous ne connaîtrons aucune sanction en 2019.
À partir de 2020, la valeur cible moyenne sera abaissée de 130 à 95 g de CO2/km : comment planifiez-vous votre flotte pour éviter des amendes salées ?
En principe, le client décide de ce qu’il veut. Nous essayons de planifier le mieux possible notre assortiment avec les produits disponibles. Ce n’est pas simple, car les batteries se font rares chez les fabricants dans toute l’Europe.
N’êtes-vous pas incité à immatriculer encore des véhicules à fortes émissions de CO2 à la fin 2019, afin de compenser les objectifs renforcés avec un montant de 109 francs dès le premier gramme à partir de 2020 et d’éviter ainsi des amendes plus élevées?
Nous pourrions y être incités. Cela coûte dans tous les cas trop cher, qu’il s’agisse des amortissements non nécessaires ou des sanctions en 2020.
Les clients se laissent séduire petit à petit par les voitures électriques, mais les SUV et les 4x4 sont toujours très appréciés des Suisses. Comment pensez-vous guider le client pour éviter des amendes ?
Nous sommes une entreprise commerciale et de services. Nous ne nous considérons pas comme des éducateurs. Au final, c’est le client qui décide ce dont il a besoin dans son quotidien. Une personne qui habite dans des régions montagneuses choisira plutôt un 4x4.
Qui passera à la caisse pour payer les amendes ? En tant qu’importateur et garagiste, vous pouvez bien sûr adapter par exemple les marges des garagistes, mais vous reportez ainsi les sanctions dans les régions et sur vos propres succursales Emil Frey …
Les importateurs passeront à la caisse. Et comme ni les importateurs, ni les garagistes ne peuvent payer les amendes avec leurs marges, nous devrons tous, en tant que citoyennes et citoyens suisses et en tant que clientes et clients, compter avec des adaptations de prix ponctuelles, comme c’est le cas avec la taxe CO2 sur les billets d’avion et les éventuelles hausses du prix de l’essence et du diesel. Au final, nous avons tous approuvé cette loi.
jas. Chaque importateur doit respecter une valeur cible spécifique assignée à son parc de nouveaux véhicules pour les émissions de CO2. En Suisse, des sanctions sont imposées depuis déjà 2012 aux importateurs de nouveaux véhicules avec des émissions de CO2 trop élevées. Les 74 grands importateurs répertoriés par l’Office fédéral de l’énergie (OFEN) ainsi que les petits importateurs ayant des décomptes individuels ont dû débourser la somme colossale de 31,1 millions de francs pour les voitures de tourisme importées en 2018. Les plus durement touchés ont été FCA Switzerland SA, importateur des marques Abarth, Alfa Romeo, Fiat, Jeep et Lancia, ainsi que Mercedes-Benz Suisse SA, importateur de Mercedes-Benz, Smart et Maybach, et encore Mazda Suisse. Ces trois grands importateurs ont dû régler près de 85 % du total des amendes.
La loi actuelle sur le CO2 prévoit l’adaptation des valeurs cibles de CO2 pour les voitures de tourisme et l’introduction de nouvelles valeurs cibles pour les voitures de livraison et les tracteurs à sellette légers dès 2020. La valeur cible de 95 g de CO2/km sera reprise des réglementations de l’UE pour les voitures de tourisme dès 2020. Une valeur cible de 147 g de CO2/km sera appliquée aux voitures de livraison et aux tracteurs à sellette légers dès 2020. Ces valeurs cibles sont très difficiles à atteindre pour les importateurs, car les valeurs de CO2 selon le nouveau procédé de mesure WLTP seront aussi introduites dès 2020. Ces dernières seront ainsi plus hautes, car les mesures WLTP représentent des consommations plus élevées et plus proches de la réalité.
Exemple tiré d’une liste de l’émission «Kassensturz»: la valeur de CO2 du modèle très apprécié en Suisse qu’est la Skoda Octavia Combi, avec 2.0 TDI et 4x4, passera de 131 g de CO2/km jusqu’à présent selon le NCEC à 164 g avec les mesures WLTP. Ces 33 g de plus font un tort considérable aux importateurs. Pour l’année 2019, la sanction se monte à 111 francs par gramme de CO2/km dépassant la valeur cible de chaque véhicule. Et elle sera de 109 francs en 2020. Cela signifie que les 33 g supplémentaires dus à la nouvelle méthode de mesure pourraient à eux seuls coûter aux importateurs 3597 francs de sanction par modèle Skoda en 2020. Le montant des sanctions est redéfini chaque année depuis 2018. Le Conseil fédéral ne règle pas seulement la méthode qui permet de le fixer, mais s’oriente également en fonction des montants pratiqués dans l’UE et du taux de change actuel.
Un point positif toutefois pour la branche automobile: l’introduction des nouvelles valeurs cibles en 2020 est accompagnée d’une phase transitoire avec des allègements jusqu’en 2022. Pendant cette période dite de «phasing-in», seuls 85 % des véhicules, et plus précisément ceux présentant les émissions de CO2 les plus basses, seront pris en compte pour le calcul des valeurs cibles en 2020. Cette proportion passera à 90 % en 2021, puis à 95 % en 2022. Mais ce «phasing-in» est combattu sur le plan politique : dans sa version de la loi sur le CO2, le Conseil des États l’a en effet supprimé dès 2021 pour les voitures de tourisme. Si le Conseil national le suivait, les conséquences seraient encore plus lourdes en ce qui concerne le montant des sanctions des importateurs.
Par ailleurs Mais à l’instar de ce qui se passe au niveau européen, l’application des prescriptions sur les émissions de CO2 sera également soumise à une phase de transition pour le calcul des valeurs cibles et pour les valeurs cibles individuelles. Jusqu’en 2020 (compris), les valeurs « NCEC 2.0 » mesurées effectivement ou calculées sur la base de la valeur WLTP seront ainsi appliquées pour le calcul des émissions des véhicules. Andreas Burgener, directeur d’auto-suisse, déclare à ce sujet : « Malgré ce calcul rétroactif, de nombreux modèles appréciés en Suisse afficheront des valeurs de CO2 plus élevées sur le papier. Le même véhicule avec une motorisation et un équipement identiques peut ainsi, depuis 2018, être intégré au calcul avec un gramme de CO2 en plus qu’avant le passage au nouveau cycle d’essai. » (Cf. également vidéo explicative)
Les importateurs pourront également décompter durant les trois années précédant 2022 des « supercrédits » pour les véhicules particulièrement respectueux de l’environnement avec des émissions de CO2 très basses. Durant les années de référence 2020 à 2022, les véhicules avec moins de 50 g de CO2/km seront ainsi comptés 2 fois, puis 1,67 fois et enfin 1,33 fois en 2022.
Cela explique aussi les efforts des importateurs pour mettre sur le marché davantage de véhicules totalement ou au moins partiellement électriques. « La branche est consciente que le passage à l’électrique est incontournable », explique Andreas Burgener, directeur d’auto-suisse. « Mais il ne faut pas oublier que l’électricité et l’hydrogène doivent être produits sans empreinte carbone. Si c’est le cas, il faut aussi en tenir compte dans le bilan carbone. » L’association des importateurs constate de plus que la Suisse doit bien plus réduire ses émissions de CO2 que l’UE durant le même laps de temps. Enfin, rien qu’en raison de la proportion plus élevée de 4x4 parmi les nouveaux véhicules, la Suisse part déjà avec des émissions de CO2 plus élevées. Selon auto-suisse, avec des efforts identiques à ceux de l’UE, la Suisse n’atteindra donc la valeur moyenne de 95 g/km qu’en 2025. Jusque-là, les importateurs devront s’attendre chaque année à des amendes salées pour le dépassement des valeurs cibles.
Et pour couronner le tout, les ventes de diesel ont massivement reculé en Suisse en 2019 et la stratégie « 10/20 » très ambitieuse d’auto-suisse aura donc une incidence plus faible. Cette stratégie prévoit qu’une voiture neuve sur dix soit électrique (VEB) ou hybride rechargeable (Plug-in-Hybrid, PHEV) en 2020 en Suisse. Seules cette électrification nette du trafic individuel motorisé et la croissance des propulsions alternatives, comme le GNC ou les moteurs hybrides, aideront les importateurs à atteindre les valeurs cibles souhaitées.
Il est primordial que les clients optent encore plus, dès 2020, pour des véhicules avec des émissions de CO2 plus basses. Sans cela, des amendes plus conséquentes s’abattront sur les importateurs l’année suivante et finiront tôt ou tard par se répercuter sur les prix pratiqués. Il est en effet impossible pour les fabricants et les importateurs de payer eux-mêmes des millions sur le long terme. Ils devront les répartir en réduisant les marges des commerces et à travers des augmentations de prix pour les clients. Et le fait que les montants ainsi récoltés terminent leur course dans le Fonds pour les routes nationales et le trafic d’agglomération (FORTA) n’est qu’une bien maigre consolation.
Afin de connaître plus précisément les amendes auxquelles la branche doit s’attendre en 2020, UPSA media s’est entretenu avec Morten Hannesbo, CEO d’Amag Group SA, et Marcel Guerry, directeur du groupe Emil Frey Suisse.
Monsieur Hannesbo, avec l’objectif « 10/20 », auto-suisse a souhaité mettre plus de voitures électriques sur les routes. Comment cette stratégie fonctionne-t-elle pour le groupe Amag ?
Morten Hannesbo, CEO d’Amag Group SA: Nos fabricants ont annoncé des véhicules électriques très intéressants pour 2020, à l’image du modèle ID.3, proposé à un prix attrayant. Nous attendons aussi de nouveaux modèles hybrides rechargeables. Je suis donc optimiste et je pense que nous atteindrons l’objectif d’ici la fin 2020.
Les amendes liées au CO2 se sont élevées à plus de 31,1 millions de francs en 2018. En 2019, la valeur cible de 130 g de CO2/km n’a pas changé. Partez-vous du principe que les sanctions de près de 820 000 francs resteront, elles aussi, au même niveau pour le groupe Amag ?
Notre objectif est de ne pas avoir à payer de taxes d’incitation avec nos marques. Nous avons cependant un groupement d’émissions avec toutes les marques de Volkswagen AG. En 2018, nous avons dû payer tout juste un million de francs de taxes d’incitation. Ce montant sera plus élevé en 2019.
À partir de 2020, la valeur cible moyenne sera abaissée de 130 à 95 g de CO2/km : comment planifiez-vous votre flotte pour éviter des amendes salées ?
L’année 2020 constituera effectivement aussi un grand défi pour nous. Nous nous attendons bien évidemment à ce que les nouveaux VEB et PHEV aient une influence conséquente. Mais nous aurons aussi une mission importante, celle de rendre alléchantes pour le client ces technologies et les autres motorisations efficientes. Nous devrons agir ici sur tous les plans.
N’êtes-vous pas incité à immatriculer encore des véhicules à fortes émissions de CO2 à la fin 2019, afin de compenser les objectifs renforcés avec un montant de 109 francs dès le premier gramme à partir de 2020 et d’éviter ainsi des amendes plus élevées ?
De telles actions ont toujours leurs avantages et leurs inconvénients. Chaque voiture immatriculée au préalable enregistre aussi une perte de valeur si elle ne peut être vendue que plus tard. Nous réfléchirons donc dans le détail à ce type d’activités et ne les prendrons sans doute pas en considération.
Les clients se laissent séduire petit à petit par les voitures électriques et au GNC, mais les SUV et les 4x4 sont toujours très appréciés des Suisses. Comment pensez-vous guider le client pour éviter des amendes ?
Les SUV et les 4x4 deviennent eux aussi de plus en plus efficients. Nos partenaires de marques auront sûrement pour tâche de définir précisément les besoins des clients et de leur présenter des alternatives en conséquence. Sans compter qu’une grande partie des nouvelles voitures électriques de Volkswagen disposent aussi d’une traction intégrale et qu’il ne s’agit donc pas obligatoirement d’un conflit d’objectifs.
Qui passera à la caisse pour payer les amendes ? En tant qu’importateur et garagiste, vous pouvez bien sûr adapter, par exemple, les marges des garagistes, mais vous reportez ainsi les sanctions sur les régions et sur vos propres succursales Amag…
Ni Amag en tant qu’importateur, ni les garagistes ne fabriquent les véhicules proposés à la vente. Selon un accord passé entre Amag et Volkswagen AG, qui a intérêt à ce que toutes les marques se retrouvent dans un groupement d’émissions, le fabricant assume les sanctions en cas de besoin. Mais c’est aussi dans l’intérêt du fabricant que les dépenses restent aussi faibles que possible. Des augmentations de prix seront donc vraisemblablement inévitables pour certains modèles.
Monsieur Guerry, avec l’objectif « 10/20 », auto-suisse a souhaité mettre plus de voitures électriques sur les routes. Comment cette stratégie fonctionne-t-elle pour le groupe Emil Frey ?
Marcel Guerry, directeur du groupe Emil Frey Suisse: Aujourd’hui, le groupe Emil Frey vend près de 40 % de tous les véhicules à faibles émissions (hybrides / hybrides rechargeables / VEB) en Suisse, selon les chiffres d’auto-suisse.
Les amendes liées au CO2 se sont élevées à plus de 31,1 millions de francs en 2018. En 2019, la valeur cible de 130 g de CO2/km n’a pas changé. Partez-vous du principe que les sanctions resteront, elles aussi, au même niveau pour le groupe Emil Frey ?
L’assortiment mixte de notre groupe nous permet de partir du principe que nous ne connaîtrons aucune sanction en 2019.
À partir de 2020, la valeur cible moyenne sera abaissée de 130 à 95 g de CO2/km : comment planifiez-vous votre flotte pour éviter des amendes salées ?
En principe, le client décide de ce qu’il veut. Nous essayons de planifier le mieux possible notre assortiment avec les produits disponibles. Ce n’est pas simple, car les batteries se font rares chez les fabricants dans toute l’Europe.
N’êtes-vous pas incité à immatriculer encore des véhicules à fortes émissions de CO2 à la fin 2019, afin de compenser les objectifs renforcés avec un montant de 109 francs dès le premier gramme à partir de 2020 et d’éviter ainsi des amendes plus élevées?
Nous pourrions y être incités. Cela coûte dans tous les cas trop cher, qu’il s’agisse des amortissements non nécessaires ou des sanctions en 2020.
Les clients se laissent séduire petit à petit par les voitures électriques, mais les SUV et les 4x4 sont toujours très appréciés des Suisses. Comment pensez-vous guider le client pour éviter des amendes ?
Nous sommes une entreprise commerciale et de services. Nous ne nous considérons pas comme des éducateurs. Au final, c’est le client qui décide ce dont il a besoin dans son quotidien. Une personne qui habite dans des régions montagneuses choisira plutôt un 4x4.
Qui passera à la caisse pour payer les amendes ? En tant qu’importateur et garagiste, vous pouvez bien sûr adapter par exemple les marges des garagistes, mais vous reportez ainsi les sanctions dans les régions et sur vos propres succursales Emil Frey …
Les importateurs passeront à la caisse. Et comme ni les importateurs, ni les garagistes ne peuvent payer les amendes avec leurs marges, nous devrons tous, en tant que citoyennes et citoyens suisses et en tant que clientes et clients, compter avec des adaptations de prix ponctuelles, comme c’est le cas avec la taxe CO2 sur les billets d’avion et les éventuelles hausses du prix de l’essence et du diesel. Au final, nous avons tous approuvé cette loi.
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