«Le déséquilibre est une réalité d’aujourd’hui, pas une éventualité de demain»
Monsieur Wernli, après le Conseil fédéral, le Conseil des Etats pose un nouvel obstacle à l’initiative vache à lait. Quelle est votre réaction?
Urs Wernli: Il fallait s’y attendre. Bien que sa composition soit traditionnellement plus bourgeoise que celle du Conseil national et que, par conséquent, on présume qu’il puisse mieux comprendre les préoccupations des milieux économiques, le Conseil des Etats s’oppose lui aussi à cette initiative. La Commission consultative a proposé le rejet par 9 voix contre 0, soit à l’unanimité. Cette position est motivée par la crainte que le Conseil fédéral ne dispose plus à l’avenir des sommes versées aujourd’hui par les automobilistes dans les caisses fédérales et en faveur des transports publics par la surtaxe sur les huiles minérales, et cela sans que les routes n’en bénéficient aucunement.
En fin de compte dans ce type de sujet, tout tourne autour de l’argent...
Effectivement. Mais cette initiative permet de parler enfin de ces sommes d’argent que les automobilistes paient depuis des années sans pouvoir vraiment en profiter, par exemple, en développant le réseau routier afin d’en éviter l’engorgement total. L’argent que les automobilistes versent dans les caisses fédérales profite à d’autres, notamment aux transports publics et à ses utilisateurs. C’en est assez, nous le disons depuis longtemps.
Le Conseil fédéral, et maintenant le Conseil des Etats, invoquent que l’initiative vache à lait pourrait conduire à une inégalité de traitement entre les utilisateurs des transports publics et les automobilistes...
C’est totalement absurde! Le déséquilibre critiqué par le Conseil fédéral existe déjà aujourd’hui et ce, en défaveur des automobilistes. L’acceptation de l’initiative permettrait au contraire de combler ce déséquilibre injuste et remettrait enfin tous les acteurs sur un pied d’égalité. Les automobilistes verseraient ainsi à l’avenir des montants desquels ils profiteraient enfin directement. Il ne s’agit absolument pas d’égoïsme, mais d’honnêteté et d’équité.
Initiative vache à lait: vote sans équivoque au Conseil des Etats
L’initiative vache à lait, largement soutenue par l’Union suisse de l’automobile (UPSA), est largement rejetée par le Conseil des Etats par 31 voix contre 4. La crainte de voir la Confédération subir des pertes de recettes fiscales de 1,5 milliard de francs est au cœur du débat.Même au Conseil des Etats, les votes étaient sans équivoque: une «débâcle financière», voire même une «attaque frontale à la politique des transports, environnementale et financière de la Confédération» ont été invoquées. L’initiative n’a pas trouvé de soutien auprès du conseil, excepté les quatre voix contraires et la requête du conseiller aux Etats lucernois Georges Theiler (PLR), qui demandait le renvoi du dossier à la Commission consultative et une nouvelle présentation au Conseil des Etats avec le projet relatif à la création d’un Fonds pour les routes nationales et le trafic d’agglomération (FORTA).
Peur pour ses propres finances
Le refus aussi net de l’initiative des organisations routières, parmi lesquelles l’Union professionnelle suisse de l’automobile (UPSA), par le Conseil des Etats et ce malgré sa majorité bourgeoise, s’explique en premier lieu par ses craintes pour les finances du canton. Les opposants à cette initiative craignaient notamment qu’en cas d’acceptation, la Confédération se voie obligée de compenser le manque de moyens financiers par des coupes budgétaires dans certaines dépenses liées, comme la formation, la recherche ou la défense nationale. Ce genre de coupe toucherait également les cantons, puisque 20 % du montant des dépenses liées leur est destiné.
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